FOLIE DES DESIRS DEREGLES
Il y a des désirs mauvais, contre lesquels il faut lutter. Cette idée, cette règle morale,
s'enracinent en particulier dans l'analyse platonicienne de l'âme. A l'intérieur d'une
partie de celle-ci peuvent naître et se développer des désirs qui, lorsqu'ils ne sont pas
réglés par la raison, sont véritablement effrayants par leur immoralité.
« -Parmi les plaisirs et les désirs non nécessaires, certains me semblent
illégitimes ; ils sont probablement innés en chacun de nous mais réprimés par les
lois et les désirs meilleurs, avec l'aide de la raison, ils peuvent, chez quelques uns.
être totalement extirpés ou ne rester qu'en petit nombre et affaiblis, tandis que
chez les autres, ils subsistent plus forts et plus nombreux.
-Mais de quels désirs partes-tu ?
-De ceux, répondis-je, qui s'éveillent pendant le sommeil, lorsque repose cette
partie de l'âme qui est raisonnable, douce et faite pour commander à l'autre, et que
la partie bestiale et sauvage, gorgée de nourriture et de vin, tressaille, et après
avoir secoué le sommeil, part en quête de satisfactions à donner à ses appétits.
Tu sais qu'en pareil cas elle ose tout, comme si elle était délivrée et affranchie de
toute honte et de toute prudence. Elle ne craint point d'essayer, en imagination,
de s'unir à sa mère, ou à qui que ce soit, homme, dieu ou bête, de se souiller de
n'importe quel meurtre, et de ne s'abstenir d'aucune sorte de nourriture ; en un
mot, il n'est point de folie, point d'impudence dont elle ne soit capable. »
PLATON, La République,